L’effort audacieux pour coordonner et catalyser le mouvement en faveur de l’avortement sécurisé en Afrique francophone débute
Rejoignant les actions du monde entier pour la Journée internationale pour l’avortement, le 28 septembre, cette semaine marque le lancement du Centre ODAS (Organisation pour le Dialogue pour l’Avortement Sécurisé / Organization for Safe Abortion Dialogue), un effort innovant visant à renforcer le mouvement pour l’avortement sécurisé en Afrique francophone.
À travers l’ensemble de la région francophone, des représentants de gouvernements, des prestataires de santé, des groupes de jeunes, des réseaux féministes, des associations professionnelles et des organisations non gouvernementales s’efforcent à combattre la stigmatisation liée à l’avortement, de mettre en lumière les conséquences des avortements à risque et de défendre la santé et les droits sexuels et reproductifs. Le Centre réunira tous ces acteurs au sein d’un réseau couvrant le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Togo et la République démocratique du Congo.
« Nous sommes ravis de nous mettre au travail pour élargir l’accès à l’avortement sécurisé dans toute la région de l’Afrique francophone », déclare Docteure Rouguiatou Balde, directrice du Centre ODAS. « Nos efforts viserons à répondre aux besoins des femmes et des jeunes filles en matière de santé reproductive – tels qu’elles-mêmes les définissent – et à réduire les obstacles aux soins tels que la stigmatisation, les lois restrictives, le manque de personnel de santé qualifié, le manque de connaissances en matière de santé reproductive, etc. Nous voulons nous assurer que les gouvernements, les établissements de santé, les dirigeants locaux et les communautés soutiennent tous l’autonomie de la personne enceinte et son droit de prendre ses propres décisions en connaissance de cause ».
Le Centre fournira un soutien technique et opérationnel au mouvement – en offrant des possibilités de formation, en partageant les meilleures pratiques, en coordonnant les stratégies et en mobilisant des fonds – afin de donner aux membres les moyens de poursuivre un programme régional ambitieux qui élargira l’accès à l’avortement dans la région. Le Centre et le Réseau ODAS seront explicitement féministes et contribueront à la construction de mouvements sociaux forts autour de la question générale du choix reproductif et en développant de nouvelles alliances intersectionnelles. Ils répondront également au changement de paradigme qu’a provoqué la pandémie de COVID-19.
« C’est un moment révolutionnaire », déclare Sosthène Dougrou, directeur d’Ipas pour l’Afrique francophone. « Pour la première fois, nous allons rassembler dans toute leur diversité ceux et celles qui travaillent pour le droit à l’avortement dans toute la région – jeunes, militants, gouvernements, parlementaires, et partenaires mondiaux, régionaux et locaux ayant une expertise technique. Le Centre ODAS est la plaque tournante qui coordonnera et soutiendra ce travail sans précédent dans la région de l’Afrique francophone ».
Au cours de ses trois premières années, Le Centre prévoit :
- D’organiser des réunions régionales de dialogue autour de l’avortement sécurisé qui rassemblent les membres et les alliés de l’ODAS pour un apprentissage partagé.
- De soutenir les dialogues nationaux sur l’avortement sécurisé afin de générer des plans de travail sur l’avortement sécurisé au niveau national et organiser des réunions de suivi pour faire avancer les plans de travail et la mesure des progrès.
- D’établir des groupes de travail régionaux et nationaux avec des responsables gouvernementaux, des experts techniques et des champions du droit à l’avortement dans chaque pays couvert par ODAS.
- De mettre en place et soutenir des groupes de travail régionaux pour faire progresser la prestation de services d’avortement, la sécurité des produits, l’engagement communautaire, la recherche, la politique, le plaidoyer et la mobilisation des ressources.
- De développer une plateforme de partenariat pour l’avortement sécurisé afin de suivre les progrès réalisés au niveau des pays sur les indicateurs d’avortement sécurisé et de faciliter le soutien technique entre les membres d’ODAS.
- De soutenir les membres du réseau pour qu’ils participent à des événements régionaux et internationaux clés afin de créer un élan autour du mouvement de l’Afrique francophone pour l’avortement sécurisé.
Ipas sera l’hôte fondateur de l’initiative et apportera un soutien opérationnel sur mesure pendant les trois premières années. Le personnel du Centre coordonnera, cocréera et façonnera de manière indépendante le mouvement ODAS naissant et planifiera une transition éventuelle vers une appropriation locale complète.
Mettre en lumière les demandes locales d’accès à l’avortement
Dans le cadre de la Journée internationale pour l’avortement sécurisé le 28 septembre, Le Centre ODAS et Ipas Afrique francophone s’associent à des coalitions existantes dans de nombreux pays de la région (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, République démocratique du le Congo, la Guinée, Madagascar et le Mali) pour mettre en évidence les besoins locaux en matière d’accès et de droits à l’avortement. Dans des contextes où l’attention a rarement été accordée au grand besoin non satisfait d’accès à l’avortement sécurisé, Le Centre ODAS rassemblera des parties prenantes de toute la société pour évaluer l’état des droits sexuels et reproductifs. Ces coalitions identifieront les défis et les opportunités à venir et s’appuieront sur les initiatives déjà en cours.
Un vaste besoin non satisfait de soins en matière d’avortement
En 2015, une évaluation des besoins et des opportunités en matière d’avortement sécurisé en Afrique francophone menée par Ipas a révélé « un vaste besoin non satisfait » en matière de soins d’avortement sécurisé. Même s’il existe dans la plupart des pays des dispositions légales relatives à l’avortement – à savoir pour protéger la vie et la santé de la femme et en cas de viol, d’inceste ou d’anomalies fœtales – dans de nombreux pays, ces lois ne se sont pas traduites en services réels pour les femmes. Il existe également de fortes oppositions culturelles, religieuses et politiques aux soins complets d’avortement, en plus d’autres obstacles, tels que la stigmatisation et le manque de sensibilisation à la légalité de l’avortement.
« Le Centre ODAS s’emploiera à résoudre ces problèmes systémiques », déclare Muadi Mukenge, responsable du développement et des relations extérieures chez Ipas. « La demande pour un mouvement durable et engagé favorable à l’accès à l’avortement est urgente, et Ipas s’enorgueillit de collaborer avec des champions régionaux pour répondre à ce besoin. Nous nous réjouissons de pouvoir partager notre expertise technique ».
Kathryn Andersen, directrice scientifique et technique d’Ipas, explique que l’initiative s’appuiera sur le cadre de travail Vers un écosystème durable de l’avortement d’Ipas et mettra à profit les décennies d’expérience d’Ipas dans tous les domaines techniques de l’accès à l’avortement centré sur les femmes.
« Il s’agit d’une fantastique opportunité de faire avancer un programme commun étendu et multiforme pour accroître l’accès à l’avortement sécurisé et favoriser des innovations en les ancrant dans les besoins et les réalités locales », déclare Kathryn Andersen. « L’une des priorités du Centre sera de veiller à ce que les politiques et les programmes soient conçus avec les femmes et les jeunes de la région ».